Jean-Claude Boulos

Après ton départ
12/10/55

J’ai laissé la fenêtre ouverte
Après ton départ
Et le vent venant de l amer verte
A soufflé quelques papiers épars
Que j’ai ramassés
Lentement, sans me presser
Car en les ramassant je lisais
Ce qu’ils contenaient
Ce qu’ils disaient…

C’étaient des lettres
Venant de toi
Jaunis par le temps, par mes doigts
Qui les compulsaient
Pour les lire et y reconnaître
Les mensonges camouflés
Que pendant des mois entiers
Tu m’as servis…

Ta vie
Que tu me donnais
Dans chaque phrase, dans chaque mot,
Dans chaque pleur, dans chaque sanglot…
« Jusqu’à mon dernier souffle, et mon dernier soupir,
« M’écrivais-tu, une fois,
« Je n’aimerai que toi,
« Je donnerai avec joie,
« Mes souffrances, ma vie,
« Mes parents, mes amis,
« Pour toi… »

Ah ! Tu ne les disais pas tout à l’heure
Quand d’un mot tu as mon bonheur
Tu m’as dit : « Tu connais Untel
« Qui a une Jaguar bleu ciel
« Deux villas meublées
« Un yacht, un chalet …
« Bien je l’épouse dans trois jours … »
« Voilà nos lettres d’amour,
« Je te rends les miennes
« Tu peux garder les tiennes
« Et maintenant, je m’e vais
« Dorénavant laisse moi la paix » ….

Et t’es partie
Ce n’était pas ton dernier soupir
Tu n’allais pas mourir
Tu avis encore ta vie
Mais tu ne m’aimais plus …

La fenêtre est encore ouverte
Et le vent qui vient de la mer verte
M’a défait les cheveux
Puis soufflant sur les papiers épars
Il les a, sous mes yeux hagards,
Traînés tout doucement près de la cheminée
Et là, en petites fournées
Il les a jetés au feu…

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