PREMIERS POEMES (Années 40-70)

02.08.08

PREMIERS POEMES (Années 40-70)

Permalien 14:51:51, Catégories: Bibliographie, Amertumes  

L’Opiomane (Delirium Tremens)
12/11/53

C’était une nuit froide une nuit de nuages
Pas un bruit dans la rue dénuée de passants
Le monde était rentré craignant un grand orage
Seule une ombre marchait sur les paves glissants

Un homme chancelant se traînait dans la rue
Ses pieds mal enfouis dans des sabots uses
Son manteau déchire découvrant sa peau nue
Et sa barbe cachant ses traits couperoses.

Malgré son œil hagard son regard était vide
Il toussait fortement et son thorax osseux
Cherchant un peu d’air frais d’une manière avide
Semblait être opprimé par la lourdeur des cieux.

Sa bouche tremblotait et du bout de sa lèvre
Un filet de salive irriguait son menton
La sueur humectait son front brûlant de fièvre
Malgré l’intense froid régnant dans le canton.

Il s’appuya soudain contre le réverbère
Qui jetait sur le sol une pâle lueur
Puis son souffle repris il aperçut par terre
Un mégot délaissé qu’il prit avec lenteur

Il chercha dans sa poche un débris d’allumette
Cacha la faible flamme au creux de ses deux mains
Aspira la fumée bleue de sa cigarette
Puis toussa à nouveau en se tenant les reins.

Alors se rappelant le but de son dédale
Il reprit son chemin marchant plus vivement
Il voulait acquérir cette drogue fatale
Il lui fallait ce soir, l’avoir absolument.

Il marchait … il marchait titubant sur la route
Son cerveau délirait. Il lui fallait l’avoir
Cet opium sacré ce soir coûte que coûte
Et il errait tout seul homme soir dans le noir.

Ses nerfs à fleur de peau côtoyaient la folie
Ses yeux se dilataient pour mieux voir devant lui
«N’importe quel opinion le meilleur ou la lie
«Il me faudra l’avoir disait-il cette nuit. »

Dans un dernier sursaut de son énergie morte
Il courut tout à coup jusqu’à une maison
«Chez Emile-Coiffeur », lisait-on sur la porte
Il frappa attendit presque hors de raison

Mais personne ne vint… Son regard devint glauque
Dans un coin de la porte il vit avec stupeur
Un papier scellé qu’il lut d’une voix rauque
«Emile est en prison» et soudain il eut peur.

Il secoua la porte en redoublant de force
A gratter le portait il s’écorcha les doigts
Puis sentant la douleur lui opprimant le torse
Il s’enfuit comme un fou une bête aux abois.

Bientôt il s’arrêta en proie à des brûlures
Il sentait dan son crâne un vide douloureux
Qui le faisait passer par d’atroces tortures
Puis tout se dissipa tout devint vaporeux.

Et défiant alors toute loi de décense
Il se déboutonne ôta ses vêtements
«Je suis nu tout comme au jour de ma naissance»
Cria-t-il et ses traits furent ceux d’un dément.

Son rictus se changea en un éclat de rire
Il se roula par terre en riant comme un fou
Son rire ressembla bientôt à un délire
Puis il lança un rôle et s’abattit d’un coup.

Sa bouche émit encore quelques hoquets horribles
Un long spasme final lui secoua le corps
Et puis après avoir lancé des cris terribles
Il tomba pour toujours dans la raideur des morts.

Un homme pantelant gisait mort dans la rue
Les pieds raidis de froid sur le pavé usé
Son manteau déchiré tout près de sa peau nue
Mais sa barbe cachant son visage apaisé.

C’était une nuit froide une nuit de nuages
Pas de bruit dans la rue dénuée de passants
Le monde était rentré craignant un grand orage
Seule une ombre tachait les gros pavés glissants.

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Jean-Claude Boulos

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